Le genre Oroya Britton & Rose
Graham Charles rapporte quelques observations sur les Oroya dans l'habitat et illustre quelques-unes des variations trouvées dans différentes localités.
Cet article a été originellement publié dans le British Cactus & Succulent Journal Vol. 18 (2) juin 2000.
Merci à Graham Charles et à la BCSS pour leurs autorisations de traduction et publication ici.
Photographies de Graham Charles.
Graham Charles a eu la gentillesse de fournir au Cactus Francophone des photos supplémentaires de meilleure qualité pour illustrer la traduction de cet article.
En préparant mon dernier voyage au Pérou, j'étais tout excité à la perspective de voir les Oroya dans leur milieu naturel. L'année précédente, j’avais visité le nord du Pérou et vu Oroya borchersii poussant dans son habitat de haute altitude. C’était en avril quand les plantes ne montrent aucun signe de fleurs, ou de fruits, mais ce nouveau voyage plus au sud se déroulant en octobre, j’avais bon espoir de voir l'espèce australe 1) en fleur. Il est difficile de trouver les périodes de floraison des plantes, c'est un sujet rarement mentionné dans la littérature. Heureusement, les connaissances acquises par certains de mes amis des Chileans indiquaient que j'y allais au bon moment, et cela s'est avéré exact. De fait, une population d’Oroya en fleur sur les hauts plateaux des Andes est une vision inoubliable, comme, j'espère, le montrent les photos.
Ce genre intéressant, nommé d’après la ville de La Oroya, a été créé par Britton et Rose dans The Cactaceae vol. III (1922) avec Echinocactus peruvianus, décrit par Schumann en 1903, comme l'espèce type. Plus tard, en 1933, une importante découverte a été décrite par Bödecker dans Kakteenkunde sous le nom d’Echinocactus borchersii, ultérieurement transféré dans le genre Oroya par Backeberg et Rauh en 1958. Backeberg amplifia la description du genre, et lista un total de 6 espèces et 5 variétés dans son « Die Cactaceae » en 1959. Depuis lors, il y a eu encore plus de noms publiés avec la description en tant qu'espèce de plantes issues des populations isolées. Donald en lista 22 de différents rangs 2) dans son Generic Review of Oroya paru en 1975 dans Ashingtonia, mais beaucoup n'avaient pas été valablement décrites.
Le genre Oroya est un genre des plus particuliers dont la parenté avec les autres genres ont été le sujet de nombreuses discussions. La tendance actuelle est de l'associer avec les membres des Borzicactinae comme les Matucana, bien que les fleurs évoquent davantage les Neoporteria au sens strict. L'espèce la plus ressemblante chez les Matucana est M. aureiflora qui a un corps similaire et une fleur actinomorphe à court tube floral, et non pas les longues fleurs zygomorphes comme la plupart des Matucana. On peut déduire que ces fleurs différentes ont évoluées pour attirer différents pollinisateurs, les oiseaux-mouches étant habituellement mentionnés. Bien que j’ai souvent vu des oiseaux-mouches visitant en Amérique du Sud les fleurs d’autres plantes, je n'en ai jamais vu sur une fleur de cactus. Cependant j’ai souvent trouvé des insectes rampants dans les fleurs d’Oroya, sans doute volant du nectar ou du pollen et pollinisant les fleurs par la même occasion.
Les Oroya sont généralement solitaires et peuvent alors former des sujets jusqu’à 25 cm de diamètre. Il existe des plantes en culture dénommées O.caespitosa ou O.minima qui rejettent beaucoup et sont donc largement répandues. Elles sont prétendument d’origine sauvage, et collectées par Knize (KK). Bien que j’ai souvent vu des touffes de plusieurs têtes dans l’habitat, je suis arrivé à la conclusion que celles-ci étaient des groupes de plantes distinctes plutôt qu'une plante ramifiée, des rejets n'apparaissent généralement qu'après la destruction du point végétatif.
La plupart des experts semblent s’accorder sur le fait que le genre Oroya est un genre fortement évolué qui s'est adapté à un habitat spécifique de type « alpin ». Son corps aplati se blottit au ras du sol où règne un microclimat plus hospitalier, une stratégie suivie par de nombreuses autres plantes dans le même environnement, où quelque chose de haut souffrirait de l'exposition aux vents et au froid extrême. La saison des pluies correspond aux mois d’été d'octobre à avril où de forts orages balaient la région, particulièrement les après-midis. En hiver les jours sont clairs et ensoleillés suivis de nuits extrêmement froides, la température du sol pouvant varier de 45°C entre le jour et la nuit. C'est vers la fin de l'hiver que les Oroya fleurissent, entre août et novembre, selon les populations.
Quand je les ai vus en octobre 1999, j'ai été étonné de voir que toutes les plantes d'un coteau fussent couvertes de fruits avec quelques fleurs tardives, tandis qu'une autre population à quelques kilomètres de là commençait tout juste à fleurir avec une multitude de boutons à peine visibles. Je me suis demandé si ce n'était pas influencé par la date à laquelle une population recevait sa première pluie. Il est aussi visible qu’au même endroit les fleurs de plusieurs plantes pouvaient être à des stades de développement différents, suggérant que la période de floraison de l'ensemble de la population pouvait s'étendre sur plusieurs semaines.
Les endroits où les Oroya poussent sont très propices à l’agriculture et je suis persuadé que de nombreuses plantes sont détruites lors du défrichage de nouvelles parcelles pour la culture de plantes vivrières comme les pommes de terre. Le sol est un limon riche, les Oroya préfèrent les pentes ou les zones, que je suspecte d’être de faible profondeur, et par conséquence qui sèchent rapidement. Ils poussent parfois parmi les rochers et côtoient souvent l’omniprésent Austrocylindropuntia floccosa. Bien que ces plantes soient menacées par l’agriculture, mes observations pourraient être erronées parce qu'elles sont faites près des routes. Je suis à peu près sûr qu'il y a un grand nombre d'Oroya dans des montagnes similaires loin des routes, ce qui les sauve pour le moment. J'ai cependant été déçu de constater qu’à un endroit des plantes avaient clairement et récemment été déterrées, les trous récents en était la preuve.
À cause du terrain montagneux, les explorateurs cherchant les cactus dans cette partie du Pérou explorent généralement près des routes. Ces routes sont rares et espacées, menant le voyageur d'une ville à une autre, avec souvent le passage d'une chaine de montagne entre les deux. Les Oroya peuvent être trouvés là où les routes grimpent au dessus de 3.500 m, échantillonnant de fait la vaste distribution de ces plantes en quelques endroits accessibles. Il en résulte que de nombreux noms ont été donnés à ces plantes, généralement au regard de variations minimes aux différentes localités. La question est donc à combien d’espèces d’Oroya avons-nous affaire ?
L’habitat des Oroya est compris approximativement entre 3.500 m et 4.300 m d'altitude, avec deux zones de répartition, séparées par un espace vide de plus de 200 km. Au nord, près de la ville de Huaraz dans la région d’Ancash, vous pouvez trouver la plante nommée Oroya borchersii, une espèce à forte spination jaune ou rougeâtre avec des fleurs jaunes naissant des nouvelles aréoles près de l’apex. Elle se trouve aussi bien dans la cordillère noire que dans la cordillère blanche et est localement abondante, poussant avec Austrocylindropuntia floccosa et parfois Puya raimondii, la broméliacée géante. La zone de distribution australe commence quelques 300 km plus au sud, près de La Oroya, et s'étend jusqu'à la région d’Apurimac. C'est dans cette zone australe que la plupart des noms d'Oroya ont leur localité. Une approche facile, et sans doute la plus juste botaniquement, consiste à nommer toutes les plantes de cette zone Oroya peruviana, qui est le nom le plus ancien. Cela conduit à inclure les sujets à fine spination du nord nommés Oroya neoperuviana par Backeberg en 1935, de même que ceux qui ont moins de côtes et des épines plus rigides au sud tels qu'Oroya gibbosa Ritter.
En préparant mon voyage dans cette région, j'ai recherché les noms et les localités dans les listes de numéros de collecte de Ritter, Lau et Knize. Il n'y avait pas d'organisation logique évidente entre tous ces taxons, ce qui laisse supposer que les noms que nous avons dans nos collections sont de peu de valeur, les numéros de collecte et leurs localisations étant les seules informations utiles. Je ne propose donc pas de débattre de cette confusion, mais si vous êtes intéressés, je vous suggère de lire l’article de John Donald dans Ashingtonia 1(12) (mai 1975). Il essaye de trouver un sens à tout cela et un compromis entre ces trois espèces et un grand nombre de variétés. A la place, j'ai inclus des images des populations visitées et une carte de leur localisation, avec mes propositions de noms valablement publiés qui pourraient être utilisés si O. peruviana n'était pas appliqué à toutes les plantes de cette zone de répartition au sud.
Habitat 243 : altitude 4275 m, pente rocailleuse humide avec vue sur le lac Conococha et le village, juste au dessus du col, sur la route de Pativilca à Huaraz. GC243.01 Oroya borchersii (épines jaunes)
Habitat 309 : altitude 4000 m, près du sommet du col sur la route de La Oroya à Tarma. Terrain pentu découvert avec de l’herbe, de la terre rouge et de la mousse. GC309.02 Oroya neoperuviana (fleurs rouges)
Habitat 310 : altitude 3900 m, sur la route de Tarma à Jauja. Pente herbeuse, plus sèche que l’habitat 309 et avec moins de plantes. Comprenant le sommet plat d'une colline basse avec des zones pierreuses. GC310.01 Oroya neoperuviana (fleurs rouges ou jaunes).
Habitat 312 : altitude 3700 m, en approchant d’Acostambo sur la route de Pampas. Pente de 45 % avec des rochers et un sol limoneux, humide. La plupart des plantes sont en fruits, avec juste quelques fleurs tardives. GC312.03 Oroya gibbosa (fruits et fleurs).
Habitat 319 : altitude 3780 m, près de la route d'Ayacucho à Andahuaylas, prairie avec des rochers et un sol limoneux. À l'est de Totorabamba. GC319.02 Oroya peruviana depressa (nombreux avec des fleurs jaunes)
Habitat 321 : altitude 3460 m, près de la route d'Andahuaylas à Abancay. Les plantes sont dans l'herbe avec des rochers entre les champs. GC321.02 Oroya peruviana depressa (fleurs roses)
Habitat 322 : altitude 3830 m, près du sommet du col sur la route d'Andahuaylas à Abancay, une colline rocheuse avec sol limoneux. GC322.02 Oroya peruviana depressa (fleurs roses ou rouges)
Toutes les fleurs des Oroya sont semblables, la couleur des pétales la plus commune étant un bicolore rose et jaune, avec des extrémités roses. Il existe des fleurs entièrement roses ou orange. Des plantes avec des fleurs entièrement jaunes peuvent être mélangées avec d’autres couleurs de fleurs ou parfois être prédominantes. Oroya borchersii a toujours des fleurs vert-jaune dans toutes les populations connues. Les nombreuses plantes importées qui furent disponibles dans les années 1970 se révélèrent assez faciles à cultiver, mais furent généralement réticentes à fleurir bien que les plantes aient été matures. Dans l’habitat des petites plantes de 5 cm de diamètre sont souvent trouvées avec quelques fleurs. Heureusement les plantes issues de semis sont plus généreuses et j’ai eu des floraisons en pots de 8 cm. Oroya borchersii doit atteindre au moins 10 cm de diamètre avant qu'il ne fleurisse dans ma serre et il produit seulement quelques fleurs chaque année.
Dans les serres du nord de l'Europe, les Oroya ont besoin d'un endroit ensoleillé autrement ils ont tendance à perdre leur aspect plat naturel et peuvent s’allonger. Un sol acide est nécessaire et un mélange bien drainant de terre et de matière organique est idéal. Les arrosages doivent être abondants pendant la période végétative et quelques apports d'eau légers en hiver préviennent une déshydratation excessive. J'ai observé que si une plante est trop arrosée juste au moment où les boutons se forment au début du printemps, ils peuvent disparaître, mais si on ne donne pas assez d'eau ils peuvent sécher et tomber! J'imagine que le temps influence aussi ce processus et je pense donc que vous devrez faire des essais et des erreurs. Dans les expositions, les Oroya concourent souvent avec des Matucana dans la catégorie spéciale et ils sont de bons challengers puisqu'ils ont une croissance généralement lente, et qu'ils sont donc plus difficiles à conserver sans défauts.
Photos publiées dans la version originale.
Oroya gibbosa GC321.02 | Oroya peruviana depressa GC322.023) |
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Bibliographie :
- BACKEBERG, C. & KNUTH, F.M. (1935) Kaktus - ABC: 282 & 416, Gyldendalske Boghandel, Copenhagen, Denmark
- BACKEBERG, C. (1959) Die Cactaceae Band III: 1683-1695, Fischer Verlag, Jena, Germany
- BÖDECKER, F. (1933) Kakteenkunde: 112 Echinocactus Borchersii Böd sp. n. 1933
- BRITTON, N.L. and ROSE, J.N. (1922) The Cactaceae Vol.III: 102. Carnegie Institute, Washington USA.
- DONALD, J. (1970) Nat. Cact. & Succ. J. 25:1;16-18
- DONALD, J. (1971) Nat. Cact. & Succ. J. 26:2;47-49
- DONALD, J. (1975) Ashingtonia Vol.1 No.12, Occasional Generic Reviews No.2 Oroya Br.&R. Holly Gate Nurseries, Ashington, Sussex, England
- KIMNACH, M. (1966) Cact. & Succ. J. Amer. XXIII: 3-13
- KRAINZ, H. (1961) Gattung Oroya Die Kakteen Lieferung 17, Stuttgart, Germany
- RAUH, W. (1958) Beitrag zur Kenntnis der Peruvianischen Kakteenvegetation. Springer Verlag, Heidelberg, Germany.
- RITTER, F. (1981) Kakteen in Südamerika Band 4:1510. Self-published.
- SCHUMANN, K. (1903) Gesamtbeschreibung der Kakteen. Nachträge: 113, Neumann, Neudamm, Germany
Traduit pour le Cactus Francophone par Olivier Arnoud
Relu par Philippe Corman
Mise en page Alain Laroze
Publié le 2010/10/07
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